Les Tunisiens de Nantes malmenés dans leur pays

Publié le par Joël BIGORGNE.

Alors qu'Ess'ghaier Belkhiri croupit toujours en prison, d'autres Nantais de Redeyef, de passage en Tunisie, subissent les vexations de la police locale.
Pas évident d'être Tunisien, d'habiter Nantes et de retourner passer quelques jours de vacances dans sa famille à Redeyef : la police du président Ben Ali fait du zèle. Il y a le cas d'Ess'ghaier Belkhiri. Arrêté à sa descente du bateau alors qu'il revenait se marier au pays, ce maçon de 29 ans croupit depuis plus d'un mois en prison. Il est accusé de « financer la rébellion » à Redeyef, petite ville minière de 30 000 habitants en ébullition sociale. Depuis son arrestation, on est toujours sans nouvelles.
« Interrogé nu, assis sur une chaise »
D'autres Nantais de Redeyef ont évité de peu les geôles tunisiennes. Depuis cette arrestation, les langues se délient peu à peu. Comme Ess'ghaier, Ali (1) a lui aussi été interpellé à sa descente de bateau, le 21 juillet dernier. Son seul tort ? Avoir participé aux manifestations de soutien à la population de Redeyef, organisée à Nantes en juin dernier.
« J'ai remis mon passeport à un policier, raconte Ali. Il a tapé mon nom sur un ordinateur et, quelques minutes plus tard, il m'a dit que j'étais recherché. Ils m'ont déshabillé et j'ai subi un interrogatoire nu, assis sur une chaise. Au bout de douze heures, ils m'ont relâché... »
Quelques semaines plus tard, c'est au tour de Mohamed (1) de subir les mêmes vexations. Même motif, même punition. Cette fois-ci, la garde à vue n'a duré « que » six heures. « Ils m'ont dit qu'en France, je salissais le drapeau tunisien. Que j'étais indigne d'appartenir à ce pays. »
Hassan, lui, évoque les « tortures morales » qu'il a subies pendant huit heures. Pas de violence. Les policiers l'ont menacé de lui retirer son passeport. Et, surtout, d'inquiéter les membres de sa famille s'il continuait à participer aux manifestations à Nantes contre le pouvoir tunisien.
« Tant que l'actuel régime est en place, je ne retournerai pas à Redeyef, martèle-t-il. J'ai deux neveux qui ont manifesté là-bas. Ils sont aujourd'hui en prison. Aujourd'hui, les droits de l'homme n'existent pas en Tunisie. Ce sont les hommes en uniforme qui font la loi. »

Joël BIGORGNE.
1) Prénom d'emprunt.
(Source: Ouest-France le samedi 06 septembre 2008 )

Publié dans ESPACE INFO

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